LE CRÂNE DE LA FACE CACHÉE - RÉSUMÉ

 

Après avoir inspiré peintres et poètes, la Lune est maintenant l'objet de la convoitise des hommes en quête d'une énergie nouvelle : l'hélium-3. Pionnière en ce domaine, la SpaceMill exploite la première mine lunaire, une entreprise vouée à un bel avenir. Mais le rêve tourne vite au cauchemar lorsque les employés de la compagnie sont victimes d'un mal mystérieux. Un mal qui entraîne la perception ininterrompue d'une musique lancinante qui rend fou. Envoyés à la rescousse, Franck et Nahid découvriront le secret le mieux gardé de l'univers, enfoui au cœur de la Lune.

 

EXTRAIT

 

"They're on the Moon watching us!"

– Neil Armstrong

 

 

Franck consultait son portable pour tuer le temps. Il lisait les pages à l’écran, espérant chasser la nervosité qui le gagnait chaque fois que la navette se plaçait sur son orbite lunaire. L’heure de prendre place dans le module d’alunissage allait bientôt sonner et, pour la première fois depuis qu’il était en service, Franck aurait bien passé son tour. Les procédures d’approche l’avaient toujours embêté, mais aujourd’hui, c’était encore pire. En effet, le message affiché sur la console de pilotage n’augurait rien de bon.

 

Rapport de quarantaine :
Plateforme de forage ouest.
Type de virus : garol.
Risque d’infection : élevé.
Statut : à confirmer.

 

Inquiet, Franck observait les mots défiler en silence. Ils laissaient derrière eux une traînée lumineuse semblable à la queue d’une comète dans le ciel. Ce simple artifice graphique donnait des allures de S.O.S. à n’importe quel message venu de l’espace. Le nom d’un chien, un numéro de téléphone, peu importe. Cela fonctionnait toujours. Sauf que, dans ce cas-ci, l’effet était on ne peut plus approprié.

 

— Capitaine Melville ! Qu’est que c’est que ça ? Vous me faites des cachotteries maintenant ?

 

Une jeune femme venait de pénétrer dans la cabine. Élancée et souple comme un chat, elle courba les épaules afin de ne pas se heurter la tête sur les moniteurs suspendus un peu partout. Ses yeux verts brillaient d’excitation et son sourire franc tranchait avec le sérieux de la situation. En la découvrant si radieuse, Franck se rappela que ce vol était le baptême de l’espace de sa compagne de voyage et il la laissa entrer sans protester.

 

— Vous êtes désormais une star, mon capitaine ! s’exclama-t-elle, le plus récent numéro d’Hebdo-Sciences à la main.

 

La photo de son collègue occupait toute la couverture du prestigieux magazine. On le voyait, posant dans sa combinaison spatiale devant une large tapisserie médiévale. L’œuvre du XIIe siècle faisait contraste avec l’équipement moderne du jeune homme. Un groupe de moines étaient agenouillés près de lui, les mains jointes en signe de dévotion. Leurs pieux visages étaient tournés vers un vitrail qu’illuminait l’astre de la nuit. « Prières à la Lune », pouvait-on lire en surimpression au bas du cliché.

 

— Nahid, je vous en prie. Combien de fois devrai-je vous répéter que je suis commandant, pas capitaine.

— Désolée...

— Pour ce qui est de l’article, je risque de vous décevoir. Je l’ai lu au sol. C’est truffé d’erreurs.

— Ah ? Vraiment ? Moi, je trouve cela très bien. Écoutez ce passage : « Le plus réputé des astronautes de l’Alliance spatiale, Franck Melville, a été choisi pour mener une mission entourée du plus grand secret. Il sera assisté dans sa tâche par Nahid Majumdar, sommité de la Société pakistanaise d’ethnomusicologie. » Je suis une sommité, vous vous rendez compte ? L’experte des tambourins et des clochettes, c’est moi !

— Voilà bien ce que je disais : c’est truffé d’erreurs, ne put s’empêcher de plaisanter Franck.

— Très spirituel, comme toujours, répliqua la jeune femme en lui assénant un coup de magazine sur la nuque.

— Hé ! Doucement ! Je vous signale qu’abîmer la propriété de l’Alliance est considéré comme un acte de sabotage.

— Vous avez raison, mon capitaine. Nous devons préserver ce précieux document pour les archives ! le taquina Nahid en faisant disparaître la revue dans ses affaires.

 

Franck retourna à son écran, agacé par l’importance qu’on accordait à cette feuille de chou. Le reportage qui lui était consacré prétendait lever le voile sur les enjeux de sa mission. En réalité, il n’en était rien. Soucieux de vendre son papier, le journaliste s’était plutôt attardé à la personnalité du commandant et à la silhouette agréable de sa partenaire. Rien de nouveau sur l’étrange affaire qui avait précipité l’envoi de cet équipage inusité dans l’espace.

 

Au fond, c’est sans doute mieux ainsi, songea Franck avec sagesse.